10 October 2009

Musicothérapie – La harpe thérapie

Ouest-France du 2 juillet 2009

À l'hôpital, sa harpe fait du bien

SIDE_2765930_1_apx_470__w_ouestfrance_ Esther Griffioen joue d'une toute petite harpe, lovée contre elle. Souriante, sûre des effets des notes de son instrument sur les corps et les esprits.

Chaque semaine,Esther Griffioen pousse les portes du service où l'on traite les cancers, au centre hospitalierde Vannes. Musicothérapeute,elle joue de la harpe.Une thérapie tout en douceur qui fait son effet. « C'est surprenant dans un hôpital, mais apaisant », dit un patient.

Midi à l'hôpital de Vannes. Les chariots livrent les plateaux-repas dans l'effervescence. Des portes s'ouvrent sur le long couloir, se referment sur des sourires, des infirmières se croisent.

Soudain... De la harpe. Les notes enveloppent le service d'oncologie, où l'on traite des malades atteints du cancer, se faufilent dans les chambres, font taire les chariots. Inondée par la lumière d'une fenêtre, Esther Griffioen apparaît, surréaliste, au fond du long couloir. Elle joue d'une toute petite harpe qui fait corps avec elle. Nelly, l'infirmière, s'approche à pas feutrés : « Il va falloir arrêter... Un monsieur est très fatigué. »

Esther comprend. Depuis un an et demi, elle se rend à l'hôpital chaque semaine. Grâce à l'association Faire face ensemble, qui entoure les malades atteints de cancer, elle a pu entrer dans ce service avec sa harpe thérapeutique.

Ainsi, à 42 ans, « je suis enfin à ma place, ici ». Cette Néerlandaise, installée dans le Morbihan depuis dix ans, a donné du sens à sa vie dès lors qu'elle a délaissé « l'encombrante harpe de concert. Sur Internet, comme un signe, je suis tombée sur la harpe idéale et l'unique formation au monde de ' harpe thérapeute '. Ce que j'ai toujours voulu faire ! »

Ces harpes thérapeutiques « ont été travaillées pour qu'il n'y ait pas de sons stridents. Même les personnes sous morphine, ultrasensibles, ne sont pas agressées ». L'instrument est peu encombrant. La harpiste peut jouer et évoluer « partout où les gens ont besoin de cette musique. Ses vibrations sont celles qui se rapprochent le plus de celles du corps humain ».

Esther met en pratique sa formation de harpe thérapie, suivie aux États-Unis, après deux ans et demi de travail. Le principe : c'est « la musique qui fait le pouls ». Musicienne de formation classique, elle a étudié et approfondi une douzaine de répertoires, de tous styles, de toutes époques. Attentive à une respiration, à une expression, à une tension, elle adapte les notes, les mélodies, les rythmes « aux patients, à leurs états émotionnels ».

Depuis qu'elle a commencé à jouer, la musicienne thérapeute observe « les respirations se régulariser, les visages de souffrance se détendre, des personnes qui ne communiquent plus, s'éveiller ».

« Je sensles vibrations »

C'est ce que disent aussi Sylvie et Guy, des patients. Esther les a rejoints dans la salle commune. Ils sont assis autour de la grande table. Sylvie noircit les cases d'un jeu fléché « pour passer le temps », le temps du traitement. Elle qui se dit « patiente et positive », apprécie, dans un grand sourire, « un peu de musique relaxante ».

Esther pince et effleure les vingt-quatre cordes qui livrent une mélodie cristalline. Sylvie pose son crayon. « Ça me fait penser à la forêt de Brocéliande, au vent, aux feuilles ! » Et, l'instrument contre elle, improvise un « quatre mains » : Au clair de la Lune. « J'adore, c'est très agréable, facile. Je sens les vibrations dans mes mains. »

Guy, ancien pompier de Paris, a parfois assuré la surveillance lors de concerts, y compris de harpe. « J'ai toujours aimé. C'est surprenant dans un hôpital, mais apaisant. » Il accepte de toucher l'instrument qu'Esther a posé à plat devant lui sur la table. « Je ne peux pas me servir de ma main droite, elle me fait mal. » Mais il touche les cordes, surpris de « sortir des sons pareils ».

Les infirmières et aides-soignantes vont et viennent. « Oh, que ça fait du bien d'entendre Esther quand on passe !, soupirent d'aise Nelly et Sabrina. On est plus zen. Le rythme des soins est comme changé. Notre rapport aux patients aussi. Tout le monde l'attend chaque semaine ! »

Ouvrir les portes de ce service de quinze lits à une musicothérapeute est « bénéfique à tous ceux qui sont ici, a pu constater David Le Roux qui encadre l'équipe paramédicale. C'est faire entrer la vie extérieure à l'hôpital. C'est une plus value pour les patients qui, en majorité, apprécient. Et la harpe, c'est un symbole, surtout ici en Bretagne. »

De l'avis d'un des oncologues qui œuvre dans cet hôpital de jour, « la harpe thérapie crée une atmosphère de nature à apaiser les angoisses des patients ». Le Dr Vuillemin affirme qu'« elle fait l'unanimité dans la communauté soignante et tient, sans nul doute, à la personnalité de la harpe thérapeute ! »

Et, alors, la musicienne de rêver à des concerts de harpe à l'hôpital avec les patients, les médecins, les infirmières, « comme aux États-Unis ». Elle imagine une myriade de harpistes qui joueraient de chambre en chambre...

Isabelle JOHANCIK.Photo : Thierry CREUX.

 

Une petite vidéo pour compléter la note. Ici, on est au Kansas et une religieuse (sœur Sheila Taylor) joue de la harpe pour les malades dans le service d’oncologie.

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